Échos à l'actualité

Résister à l’air du temps


Stratégie, sujet et contretemps chez Daniel Bensaïd

Daniel Bensaïd a toute sa vie été un militant, loyal, tenace, fidèle à ses idées ; ce qui frappe, c’est d’abord d’ailleurs cette continuité dans le temps. Philosophe, il est aussi le penseur intempestif du « contretemps ». Le mot lui est cher ; il l’emprunte à Marx et à son « zeitwidrig », opposé au temps dominant ordonné par l’oppression et l’exploitation1. « Éloge de la résistance à l’air du temps », le travail philosophique et politique de Daniel Bensaïd est pétri d’un rapport fort à l’histoire. Il refuse le mécanisme, le déterminisme, une sorte d’objectivité sans sujet. Au contraire, pour lui l’histoire est ouverte, pleine d’incertitudes et de tâtonnements ; elle n’est pas linéaire et ne se déroule pas dans le confort des gestionnaires. Surtout, elle est faite par la volonté d’hommes et de femmes qui s’engagent, se lancent, ont du courage et se font sujets. Daniel Bensaïd le rappelle : « le temps ne fait rien à l’affaire. Et il n’a pas de mains ». Ce n’est pas lui qui rend la justice, ce n’est pas lui qui panse les plaies. « Il y faut le doigt de l’événement2 » ; donc, l’action et la volonté. Daniel Bensaïd voit l’histoire comme exercice d’une liberté et d’une responsabilité. Selon Razmig Keucheyan, Daniel Bensaïd est « le plus stratège des penseurs critiques contemporains »3. La stratégie est bien un art du temps, de son rythme, des moments à saisir, des cadences. On ne s’étonne pas de l’attrait qu’exerce sur lui l’oxymore forgé par Georges Steiner : une « lente impatience4 ». La politique aussi est un art, l’art des possibles et plus encore l’art de leur « actualisation5 ». Elle est stratégique en ce qu’elle analyse les lignes de front, les protagonistes en présence et les rapports de force, les alliances et la conflictualité – contre une vision consensuelle qui masque toujours au fond les rapports de domination. Mais la politique est aussi un mode de vie et une éthique – une fidélité. On aurait pu intituler ce texte « Être et temps », si Bensaïd n’était pas en tous points opposé à Heidegger. Mais c’est en partie de ça qu’il s’agit : comment être un sujet, comment inscrire la lutte dans le temps, comment penser stratégiquement, sans jamais craindre d’être à contre-courant.

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Premiers regards sur Daniel Bensaïd
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