Les tricots rayés:

 

Nous aimons passer quelques jours de temps en temps au mouillage sous le vent de l'ilot Signal à environ 7 milles de Nouméa. Nous y trouvons le calme loin de l'agitation de la ville, l'eau transparente pour se baigner et de belles plages pour la promenade.
Lors d'une de nos visites, il y avait aussi une petite équipe de scientifiques du CNRS dirigée par Xavier Bonnet. Celui nous a expliqué:
Parmi la quinzaine d'espèces de serpent de mer vivant en Nouvelle Calédonie, seules deux d'entre elles reviennent régulièrement à terre: Les tricots rayés.

 

 

  Les tricots rayés sont des serpents amphibies. Ils vont dans la mer pour se nourrir. Ils chassent les murènes et les congres et reviennent sur terre pour digérer.  Il y a le tricot rayé doré et noir ( Laticauda saintgironsi) que l'on voit plutôt le jour et qui chasse dans les patates de corail. Il y a le tricot rayé bleu et noir (Laticoda laticaudata) qui est plutôt  noctambule et préfère les fonds meubles.

Ils ne sont vraiment pas farouches et on peut les observer de très près.

     
Ces serpents muent deux ou trois fois par an. Ils viennent à terre aussi pour se reposer. Ils se cachent sous les rochers et dans les anfractuosités entre les pierres et les racines ainsi que dans les terriers des puffins et des pétrels.

Entre Décembre et mars, les femelles pondent en général trois gros œufs à terre à l'abri des fortes déshydratation et de la chaleur. Les éclosions ont lieu entre mai et aout.

La durée de la vie d'un tricot rayé est estimé entre 5 et 15 ans mais on dispose encore de peu de données à ce sujet.  D'ou l'intérêt des études...

Les scientifiques qui se trouvaient sur l'ilot Signal lors de notre visite continuaient l'étude et le recensement des serpents "tricot rayé" qui ont colonisé les ilots du Sud de la Nouvelle Calédonie.
Toutes les données et les mesures sont mémorisées sur un ordinateur.
 

 
    Xavier Bonnet et un jeune de son équipe
  Cette fois ci, un des buts de leur séjour est également d'implanter un enregistreur de données et un petit émetteur dans le corps d'une douzaine de serpents "tricot rayé".

Il faut d'abord endormir le serpent en le plaçant dans une boite contenant un dérivé du Chloroforme. La boite est en plastique transparent et cela permet de surveiller l'endormissement de la bête. Mais un tricot rayé ça peut faire de l'apnée pendant deux heures et il ne s'en prive pas quand ça ne sent pas bon dans la boiboite.
Il est donc quelquefois utile de faire un petit complément d'anesthésie directement dans la glotte après lui avoir ouvert la mâchoire. Il faut bien doser pour ne pas "trop" endormir le serpent. Le but est qu'il soit KO durant un quart d'heure. Les serpents bien gras sont plus résistants au sommeil que les tout maigres.

     

Le chirurgien insère une pipette qui facilitera le placement de l'antenne de l'émetteur sous la peau du serpent.


L'animal à peine soutenu, semble ne rien sentir.


Quelques points de suture et c'est fini.
 

  Le chirurgien fait une incision dans le flanc du serpent après le cœur, le foie et l'estomac qu'il sent en palpant depuis la tête vers la queue. A cet endroit il n'y a plus d'organes vitaux. L'émetteur et l'enregistreur sont placés et la petite suture est à peine visible. Les chercheurs garderont les serpents plusieurs jours dans un sac, le temps de la convalescence. La cicatrisation est totale en 3 semaines. Ils seront alors relâchés.

 

L'enregistreur mémorise toutes les 5 secondes la profondeur à laquelle se trouve le serpent avec une précision de 20 cm. Il enregistre aussi toutes les 30 secondes la température du corps. Les tricots rayés partent pour de longues campagnes de pèche, ou pour de courtes balades. Les informations permettront de comprendre leurs parcours. En général ce type de serpent revient sur son île. Les scientifiques qui les attrapent et les tatouent depuis de nombreuses années retrouvent régulièrement les mêmes (ça vit 10 ans un tricot rayé).

Le petit poste émetteur qui fonctionne 5 mois facilitera le repérage du serpent quand il faudra le récupérer pour lui retirer l'enregistreur. Si le serpent n'est retrouvé qu'après un an par exemple, l'émetteur ne fonctionnera alors  plus, mais avec son tatouage on reconnaitra le serpent et les données enregistrées sont toujours mémorisées.

L'animal sera à nouveau opéré, soigné et remis en liberté.

  On a lu quelque part que le poison du tricot rayé est plus puissant que celui du cobra. En tous cas les poissons qui sont mordus sont foudroyés. Pour l'homme, les effets sont discutables et dépendent de la dose que le serpent pourrait injecter par accident. Car ce serpent n'est absolument pas agressif envers l'homme. Les chercheurs plongent la main dans le sac qui en contient 50 pour en retirer une poignée, sans faire attention le moins du monde où se trouvent les bouches.

Nous ne pouvons cependant que conseiller de ne pas les toucher quand ce n'est pas indispensable. Ne serait ce que pour leur tranquillité.

     
  Il existe des tricots rayés de bonne taille comme celui qu'a trouvé Gibé sur l'ilot du phare Amédée. Il y a aussi des bébés qui semble hypnotiser le regard de la jeune assistante sur l'ilot Signal.

     

Après que les scientifiques ont  tatoué les serpents pour leur donner un nom qui permettra de suivre leur vie dans les îlots si on les capture à nouveau, on peut les relâcher.
Ca c'est un petit boulot que l'on peut faire. (les attraper aussi).

 
     
La première fois qu'un chercheur a retourné un sac plein de serpents sur nos pieds, on a voulu grimper sur la table... Mais comme il n'y en avait pas... Maintenant nous sommes habitués.

 

Les reptiles sentent rapidement qu'ils sont à nouveau libres. Ils goutent la chaleur du sable et s'éparpillent. La plupart reviendront vers la mer pour apprécier les caresses de l'eau.

 

Bonne baignade !

Des serpents marins curieux, tricots rayés ou non, viennent parfois observer les plongeurs. il suffit de s'éloigner calmement et de laisser l'animal reprendre son activité.

 

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